Moeurs d’un autre temps

vendredi 3 septembre 2021
par  Francis RENOUT
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Avant d’arriver aux histoires déconcertantes concernant cet article, il faut se placer dans le contexte historique de l’époque. C’est l’histoire de la conquête d’une colonie et du rôle de la famille Dyel à la Martinique. Cette famille Dyel est une très vieille famille du Pays de Caux. En effet, en 1148, Robert Dyel, seigneur de Cailleville et de Néville, partait en croisade avec le roi Louis VII.

Des siècles plus tard, un descendant, Jacques Dyel du Parquet, de vieille noblesse cauchoise, capitaine de régiment et lieutenant général, devint gouverneur de la Martinique. Il rachèta cette île en 1651 après avoir été gouverneur pour le compte de la Compagnie des îles d’Amérique (voir l’article à son sujet).

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Histoire de Marie Bonnard :

L’histoire d’aujourd’hui concerne son épouse Marie Bonnard. Celle-ci, originaire de la région parisienne, fit annuler son précédent mariage avec un certain Chesneau de Saint André, commis général de la Martinique, par un jésuite de l’ile, pour pouvoir se marier avec Jacques Dyel. Ils furent mariés secrètement le 21 novembre 1645 par Guillaume Tournemire. La cérémonie solennelle fut célébrée par le père Techenel, dans la chapelle Saint Jacques, au Carbet, le 30 avril 1647.

Marie devint régente de la Martinique à partir de janvier 1658, après le décès de son mari, ayant la tutelle de ses deux enfants. Celle ci eut quelques difficultés à faire valoir les droits de ces derniers Jean Jacques Dyel d’Esnambuc (8 ans) et Louis Dyel du Parquet (5 ans) à la succession de leur père. Le 15 septembre 1658,le roi nomma Adrien Dyel du Vaudrocques gouverneur avec sa belle-soeur Marie Bonnard jusqu’à la majorité de l’aîné de ses fils.

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Déjà en 1657, les colons, surtout les plus modestes, avaient exprimé leur mauvaise humeur. En effet, Du Parquet avait établi un droit exceptionnel (cinquante livres de tabac) pour renforcer la défense de la zone française contre les Caraïbes. A Case-Pilote, en novembre 1657, Bourlet déclarait à Du Parquet, au nom des colons du quartier, qu’ils ne paieraient pas le nouveau droit. Ces rebelles essayèrent d’étendre l’agitation au Prêcheur où il y avait beaucoup de petit colons. Il avait fallu que Du Parquet, malade, se rendît lui-même à Fort-Royal et au Carbet pour en assurer le paiement.

Dans un premier temps, Marie Du Parquet (Bonnard) accepta les revendications des rebelles. mais le bruit courut qu’elle complotait avec l’anglais Jacques de Maubray pour livrer l’île aux Anglais. Accusée de trahison, elle fut traduite devant le Conseil Souverain de l’île. Le 6 août 1658, le Conseil décida de la destituer et de la mettre en résidence surveillée dans un magasin du quartier de la Place d’Armes au Prêcheur.

Les colons désignèrent alors M. de Gourselas pour assurer l’intérim de Gouverneur. Mais l’intervention du roi devait mettre les choses au point. En effet , le 15 septembre 1658, il nomma le fils aîné de du Parquet Gouverneur et Lieutenant Général de la Martinique. Mais l’enfant étant en bas âge, c’est son oncle Adrien de Vaudroque qui reçut la mission de veiller à la conservation de ses biens jusqu’à ce qu’il ait atteint l’âge de 20 ans. La désignation de De Vaudroque comme Gouverneur ne fit pas l’unanimité chez les colons et provoqua une sédition des partisans de Marie.

Quelques lettres du XVII ème siècles :

https://www.persee.fr/doc/outre_0300-9513_1961_num_48_170_1331

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(Lettre de Marie Bonnard, le 2 mai 1659)

En 1659, le 23 juin, Marie Bonnard, donne son habitation du fonds Saint Jacques, aux religieux de l’Ordre de Saint-Dominique, alors sous la direction du Père Boulogne. Cette donation venait en récompense des efforts de ces religieux dans la guerre contre les Caraïbes de la Capesterre, en 1658. En hommage à son époux, le sieur Jacques Dyel Du Parquet (mort le 3 janvier 1658), gouverneur de la Martinique, et propriétaire de cette île comme de Sainte-Lucie, de Grenades et des Grenadines depuis le 27 Septembre 1650, Mme veuve Du Parquet offrit ce domaine et son nom.

Volet d’histoire de la Martinique :

http://www.martinique.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/Pages_de_03_Histoire_13-03-29-_normal1partief-red_cle0d1112.pdf

Moeurs d’un autre temps :

Suite à une insurrection des colons, Marie Bonnard, alors malade, souffrant de rhumatismes, s’embarque pour la France en août 1659, sur un bateau en route vers Saint Mâlo. Elle meurt en mer, pendant la traversée de l’Atlantique, en septembre 1659, un mois après son départ. Ses parents et ses amis supplièrent le capitaine de conserver son corps afin qu’on puisse l’enterrer en terre sainte. Il fut alors dépecé, salé et hermétiquement enfermé dans un tonneau. Mais il fallut quand même le jeter à la mer après une cérémonie ; les matelots s’étant imaginés que ce funèbre colis était la cause d’une interminable tempête. Pourtant cette région des Antilles est connue pour ses ouragans, ses tempêtes tropicales et ses cyclones. Le père Dutertre, chroniqueur scrupuleux, en parle dans son histoire générale des îles.

C’est dans des circonstances similaires qu’une aventure arriva à l’une des plus anciennes femmes de la Martinique, Mme Roche, originaire de Dieppe, ou plutôt des environs, car elle parlait patois comme si elle était encore dans le Pays de Caux.

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Son mari avait été tué, dans un combat, sur la montagne pelée. Trois mois après, les morts étaient encore sans sépultures. Mme Roche voulut faire enterrer le corps de son mari à l’église sainte Anne de Macouba, sa paroisse, située au nord de la Martinique.

Elle alla donc le chercher avec l’aide de deux de ses esclaves, croyant ne trouver que des os ; mais le froid qui sévissait sur la montagne, l’avait conservé. Cela rendait le transport du corps impossible à cause de l’étroitesse et de l’escarpement des chemins.

Cet incident aurait embarrassé tout autre personne que Mme Roche ; mais comme elle était une femme d’exécution, elle fit couper son mari en morceaux par ses deux esclaves. Ces derniers emportèrent les restes humains jusqu’à Macouba où ils furent inhumées.

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Ces mœurs nous étonnent et nous choquent. En ces temps là, on n’était pas aussi sensible et le désir d’assurer une sépulture chrétienne aux défunts, primait sur les répugnances de la nature.

F.Renout
(Administrateur cgpcsm)
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Sources :
La Vigie de Dieppe du 28 février 1936
La noblesse de Haute Normandie (la Chesnaye des bois)


Documents joints

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