La Famille HAMEL : d’Avremesnil en Nouvelle France
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La famille Hamel est originaire d’Avremesnil depuis la nuit des temps, car on retrouve ce nom pour la première fois en 1518 sur un aveu à l’abbaye Saint-Ouen. Plusieurs familles y étaient établies en ce début du XVI ème siècle.
Nommé Avremesnil en Caux en 1600 ou Evrart Maisnil vers 1040, ce petit village situé au sein du Pays de Caux, est entouré par Saint Denis d’Aclon, le Bourg-Dun, Luneray, Gueures et Ambrumesnil, à 4 lieues au sud-ouest de Dieppe. Il fut le berceau de la famille Depardieu, seigneurs du lieu.
Ce patronyme Hamel désigne celui qui habitait un hameau ou un groupe de maisons en dehors du bourg.
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François Hamel dit "la France" épouse Catherine Carpentier vers les années 1620/1623, sous le règne de Louis XIII. Ils eurent au moins quatre enfants : François, l’aîné, Charles, Marie Anne et Jean. François est mentionné sur un aveu de l’abbaye de Saint Ouen,daté du 6 juillet 1627, certainement lors de la transmission d’un bien le concernant. Catherine, dit « la pierre » décède le 25 juin 1646 à Avremesnil. François est blattier entre 1646 et 1657, c’est à dire marchand de blé. Il décède à son tour le 5 février 1657 dans le village de ses ancêtres.
C’est donc François Hamel fils, qui hérita des biens de ses parents comme le veut le droit coutumier normand apparu au Xème siècle et aménagé au cours du temps par des arrêts du parlement de Normandie. Ce système de succession excluait les filles en raison de leur impossibilité de transmettre les biens dans la famille. Il se marie avant 1653, à Avremesnil avec Anne Jeanne Durand dont il eût deux filles.
– Marie Anne, seule fille du couple, se marie à Dieppe, paroisse Saint-Jacques, le 12 juin 1663 avec Jacques Julien, bourgeois du lieu.
– Charles et Jean, fils puînés, seront les premiers Hamel qui iront s’établir en Nouvelle France. Ceux-ci auront une nombreuse descendance.
Charles, dit « la France », blattier comme son père, né vers 1624, se marie le 29 avril 1647, à l’église Saint Aubin, à Avremesnil, avec Judith Marguerite Auvray. Le même jour, son père se marie en secondes noces avec Marie Lozier. Le père et le fils épousant la mère et la fille. Extrait de l’acte : "Ont été mariés François & Charles HAMEL, père & fils et Marie LOZIN & Judit AUVRAY, mère & fille, savoir ladite LOZIN audit François HAMEL et ladite Judit audit Charles HAMEL
Judith Marguerite lui donnera un fils Jean qui naîtra en 1652. Elle meurt jeune, neuf ans après son mariage, le 28 janvier 1654 à Avremesnil, laissant Charles seul avec un jeune enfant.
Charles se marie en secondes noces avec Catherine Lemaistre, le 19 juin 1656, à Dieppe, paroisse Saint Jacques. Le mariage est célébré en présence de François Hamel, Vincent Glorial, bourgeois de Dieppe et de Pierre François, lesquels "nous ont attesté que François Hamel père du susdit consent au mariage et qu’il n’a pu y assister à cause de son incommodité". De cette union, naîtra Charles le 7 septembre 1658 à Avremesnil. Son parrain sera Jean Hamel, son oncle.
Jean Hamel, dernier fils, né vers 1636, se marie à son tour le 6 mai 1658, à Avremesnil, avec Marie Auvray. Il connaît la jeune femme depuis quelques années car celle-ci est la sœur de Judith qui épousa son frère Charles.
Nos ancêtres et leurs terres : les aveux :
http://www.geneacaux.fr/spip/spip.php?article66
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Organisation du départ :
Quand est ce que Charles et Jean décidèrent de partir pour la Nouvelle France ? Est-ce que les deux couples et les deux fils de Charles partirent au cours d’un même voyage ? Difficile à dire ! On sait que Charles était encore en France en septembre 1658, date de naissance de son fils Charles ; quant à Jean, on retrouve un contrat de location de terre pour sept ans, en Nouvelle France, en décembre 1656 alors qu’il se marie le 26 mai 1658 à Avremesnil ! Cette terre appartenait à Jean Gloria.
Tout laisse à penser qu’ils partirent de Dieppe. Dieppe a toujours été un port de pêche et de commerce. Ses bateaux naviguaient sur tous les océans.
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Engagés, enrôlés, passagers libres, tous vers le Nouveau Monde
Les jours de marché, dans les foires et dans les ports, les marchands, les capitaines de navire, les officiers de la Marine défilent à la recherche de main-d’œuvre et de soldats pour peupler ces nouveaux territoires et établir des comptoirs. Certains n’hésitent pas à racoler de jeunes gens en usant de promesses sans leur donner la moindre information sur leur destination. Des hommes, avec ou sans famille, sont engagés pour travailler au service d’un planteur, d’un agriculteur ou d’une corporation pour une durée moyenne de trente-six mois. On recherche des laboureurs, des journaliers, des tonneliers, des tisserands, des charpentiers, des maçons, des tailleurs de pierre et des chirurgiens.
Les hommes s’engagent surtout l’hiver, en décembre et en janvier. Très peu partent au moment des semailles et des moissons. Mais la migration familiale est plutôt l’exception que la règle.
Les engagés souscrivent un contrat auprès d’un notaire précisant la durée de leur service, de trois à sept ans en moyenne, les gages, l’hébergement et les conditions de retour au pays. D’autres personnes partent sans contrat avec l’espoir de trouver une fois sur place de quoi vivre. Elles sont désignées par le terme de « passagers libres ». Les plus pauvres n’ont pas les moyens de payer la traversée. Sans embauche, une fois la terre promise atteinte, ils devront louer leur force de travail auprès d’un colon ou d’un marchand et rembourser les frais de leur traversée dans un délai fixé avant leur départ.
Que faire pour retrouver son nom sur la liste des passagers ou son contrat d’engagement ? En premier lieu, il faudra recenser la liste des notaires faisant office dans les ports d’embarquement. Puis, il conviendra d’explorer les minutes notariales pour les périodes recherchées. La liste des engagés sous les yeux, le chercheur ne devra pas se décourager. Les noms se suivent sans distinguer les engagés des « passagers libres »
Immigration en Nouvelle France :
http://www.famillescouture.com/population-immigration-en-nouvelle-france/
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La traversée :
Se rendre en Nouvelle-France relève d’une expérience périlleuse. La traversée vers la Nouvelle-France est soumise à toutes sortes d’aléas : climat, attaques de corsaires, maladies de l’équipage et des passagers. La durée de la traversée est donc variable : en 1665, Jean Talon, le nouvel intendant de la Nouvelle-France, met 117 jours pour gagner Québec et, en 1687, le vaisseau l’Arc-en-ciel met 35 jours. Compte tenu des exigences de la saison de navigation, il vaut mieux quitter la France avant le 1er mai et Québec avant la fin septembre.
Les navires ne dépassant guère deux cents tonneaux au XVIIe siècle, les conditions de confort sont fort modestes et la place limitée. Il faut apprendre à vivre ensemble pour plusieurs mois. La plupart des embarqués dorment dans la cale, avec la cargaison de marchandises, notamment animale qui accompagne les engagés, porcs, cochons, poules. Sur le pont le clergé prêche le Dimanche, la vie s’organise. Les vivres sont souvent insuffisantes, le manque de vitamines déciment l’équipage, le scorbut tue lentement quand ce n’est pas une tempête qui coule le navire. Souvent, vivres et marchandises sont gâtés par l’eau qui s’est infiltrée et les passagers doivent se contenter de nourriture froide et de couchages détrempés. Le régime alimentaire se compose essentiellement de viandes salées, légumes secs, biscuits et fromages. L’eau conservé dans des barils devient rapidement malsaine. Survivre aux périls et aux dangers de la mer tient autant du hasard que de la bonne étoile, tant sont grands les risques d’une si lointaine destination. Mais, en dépit de tout, la plupart des marins et des passagers arrivent à bon port.
Exemple de liste de passagers (navire Noir de Hollande :
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L’installation en Nouvelle France :
Une nouvelle vie attendait cette famille en Nouvelle France. En 1662, la colonie de Nouvelle-France reste peu développée, son peuplement atteint à peine 2500 à 3000 habitants et l’Evangélisation reste modérée. La majorité des habitants étant des hommes, le roi envoie de jeunes femmes à marier pour augmenter les naissances. Ces « filles du roi » au nombre approximatif de 850 arrivent en Nouvelle-France de 1663 à 1673 depuis l’Ile de France, Rouen ou la Rochelle avec un trousseau, voire une dot. En 1683, le peuplement atteint 10 000 habitants et près de 90% du peuplement vient désormais des naissances et non de l’expatriation.
Les colons commencent une nouvelle vie : la terre n’est pas prête à être cultivée, ils ont très peu de biens (des meubles, par exemple) et les habitudes de vie, comme trouver la nourriture, sont très différentes de la France. Un inconvénient pour les nouveaux colons est la rigueur de l’hiver. En effet, les hivers sont très froids, longs et il y a beaucoup de neige. De plus, pendant l’hiver, les cours d’eau gèlent, ce qui empêche les déplacements sur une longue distance par canot.
La nouvelle France (1534-1760) :
http://www.clioetcalliope.com/moderne/nouvelle-france/nouvelle-france.htm
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Jean Hamel, devenu laboureur, œuvra sept ans sur une ferme de Jean Gloria, louée le 26 décembre 1656. Cette ferme se trouvait entre les avenues Marguerite-Bourgeois et Vauquelin, à l’ouest du couvent Bellevue. Suite à ce contrat, il lui était interdit de faire du commerce de bois. Il ne peut abattre aucun arbre sans le consentement du bailleur, excepté son bois de chauffage qu’il doit prendre derrière la maison, et non ailleurs. La majorité des objets que les colons utilisent proviennent de France puisque personne ne les fabrique en Nouvelle-France.
Puis, il achète la terre de Nicolas Gaudry dit « Bourbonnière ». Pendant l’hiver de 1663, il bâtit une maison avec une grange et une étable. Les maisons sont faites de troncs d’arbres. Entre chaque tronc, on y étend du mortier (un mélange de boue) pour fermer toutes les ouvertures. Il y a un foyer avec une cheminée pour cuisiner et pour chauffer la maison. Une ouverture sert de petite fenêtre pour laisser entrer la lumière. Elle n’est pas recouverte de vitre, mais plutôt de papier ciré. Le toit est en pente pour empêcher la neige d’y rester. Une étable et une grange peuvent aussi être construites sur le terrain d’un colon pour y ranger les outils, les aliments et les animaux, s’il en a.
En 1664, Jean achète une partie de terre "en bois debout" sur la route St-Michel à Ste-Foy et un autre arpent qui se trouve à l’entrée du cimetière Belmont. Par la suite, il achète d’autre terres dans les environs, dont celle du célibataire Antoine Duhamel en 1665.
En 1667, les recenseurs retrouvent les frères sur la côte Saint-Michel.
De santé fragile, épuisé par le défrichement de deux terres, il meurt subitement à l’age de 40 ans, le 11 octobre 1674, à Sainte Foix. Il fut inhumé le 13 dans le cimetière de Québec. Tous ses enfants sont nés au Canada, entre 1661 et 1674. Quelques jours plus tard, le 16 octobre, Marie Auvray donnait le jour à leur cinquième enfant prénommé François. (peut-être en souvenir de son père et de son frère restés en France)
Le 27 novembre 1679 le Notaire Duquet fait l’inventaire des biens et travaux de Jean Hamel depuis 10 ans. Il trouve : Trente-cinq arpents de terre labourable à la charrue et seize arpents et demi tant en abattis qu’en fredoche ; 1 cheval, 2 boeufs de labours, 6 vaches, 10 porcs et 12 poules, du blé, de l’avoine, du seigle, des pois et du foin.
Au mois de décembre 1679, la veuve épousa René Pelletier, qui considéra les enfants Hamel comme les siens et veilla à faire fructifier la terre laissée par Jean Hamel à sa veuve et à ses héritiers. Marie Auvray n’a pas eu d’enfants de cette union. Hospitalisée à l’Hôtel Dieu de Québec, pendant 20 jours, en 1689, elle est décédée au début de l’année 1716 et, au mois de mai suivant, on procédait à l’inventaire de ses biens.
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Charles Hamel partit de France avec son épouse Catherine Lemaistre et ses deux fils Jean (né du premier mariage) et Charles (né du second mariage). On n’a aucune précision sur la date ! Par contre, le 22 décembre 1669, Charles âgé de dix ans, né en 1658 à Avremesnil, est sur la liste des confirmés. Quoi qu’il en soit, il est à peu près certain qu’en 1662, Charles et Catherine Lemaistre obtenaient du père Jérôme Lallemant, la concession d’une terre de soixante arpents faite à la Côte Saint-Michel, à Québec. Cinquante nouveaux arpents s’ajouteront aux premiers, en 1664. Pour abriter sa femme et ses deux enfants, l’ancêtre construisit une maison de pièces sur pièces, couverte de bardeaux, de quarante-quatre pieds de long par vingt de large avec une cheminée à double foyer.
Il faut attendre 1676 pour que Charles Hamel fasse à nouveau parler de lui. Ce 25 novembre, il fit l’acquisition d’une terre et une habitation appartenant à Noël Pinguet et destinées à son fils Charles. Quatre arpents par vingt bornés par les terres de Romain Duval et de Laurent Duboc, par le fleuve et par le chemin menant à Notre-Dame de Lorette, une terre que se transmettront les descendants de Charles II jusqu’au XXe siècle.
Charles Hamel et Catherine Lemaistre avaient convenu de ne pas léser Jean, né du premier mariage de son père. C’est pour cette raison que le jour où il achèta la terre de Noël Pinguet, Charles garantit à Jean, qui vienait d’épouser Christine Charlotte Gaudry, le 10 février 1677à Sillery, le versement de deux cent soixante livres tournois. Jean renonca à recevoir cet argent, le 24 juin 1684. Un mois après le mariage de Jean, ses parents engageaient un enfant de sept ans, fils de Bonne Guerrier et de Jacques Fouquées. Pour assurer la sécurité de l’enfant, sa mère avait exigé des Hamel qu’ils le soignent, le nourrissent, le gardent et l’entretiennent pendant neuf ans, comme leur propre enfant « et aussi de le fair instruire chrétiennement ».
En 1682, Charles épouse Angélique Levasseur qui vient vivre avec lui à Sainte Foy dans la maison paternelle où naîtront leurs 13 enfants. Le couple de pionniers se dissout après 1711, au décès de Charles et de Catherine Le Maistre, ses parents.
En 1688, Jean Hamel (fils de Charles né en 1652) vint s’établir définitivement à Sainte-Croix de Lotbinière. Onze enfants naquirent du couple.
Il devait devenir un des hommes les plus marquants de Lotbinière. Il s’engagea envers le Seigneur René-Chartier de Lotbinière, conseiller du Roi, à être le gardien de son manoir et fermier de son domaine. Pour récompenser le travail de son fermier, le Seigneur de Lotbinière lui concéda, le 24 novembre 1684, "une terre de 14 arpents de front sur le fleuve St-Laurent par 30 arpents de profondeur" situé entre "les lots de Jean Beaudet et de Jacques Gauthier". (Contrat Rageot)
Le 28 décembre 1695, "Les Religieuses Ursulines concédaient à Jean Hamel 10 arpents de front sur 40 de profondeur à prendre sur leur concession du Platon Sainte-Croix". Le 13 février 1698, "Les Religieuses lui accordaient encore au bout de la première, 5 arpents de front sur la même profondeur". (Greffe Chamballon,voir le cadastre Catalogne 1709) En 1698, Jean Hamel possédait donc 80 arpents de longueur sur le Platon Sainte-Croix, de la grève du fleuve en allant vers le sud (situé entre Sainte-Croix et Saint-Louis de Lotbinière). Jean Hamel est décédé vers 1709 à l’âge de 57 ans. Il est l’ancêtre des Hamel du comté de Lotbinière. Ses descendants se sont aussi multipliés dans la région des Trois-Rivières, les Cantons de l’Est, la plaine du Richelieu et les six états de la Nouvelle-Angleterre.
Ces émigrants ont-ils atteint leur espérance ? A cette question, nulle trace dans les archives. Aussi, le chercheur doit-il faire revivre ses sources, dresser le cadre de vie dans lequel ses ancêtres ont évolué, le paysage, les métiers, la vie quotidienne... Un premier pas : se documenter sur l’histoire de ces contrées lointaines. Vaste programme et surprises promises !
Une plaque commémorative a été apposée dans l’église de St-Jacques de Dieppe en 1981.
F.Renout
(Administrateur cgpcsm)
Sources :
1) Recherches personnelles sur la base de données Généacaux et archives en ligne de Seine Maritime
2) Bertrand Fleury (association des généalogistes associés)
3) Ginette Castonguay
4) Laurent Hamel (mémoires de la sté généalogique canadienne-française de décembre 1979)
5) Michèle Champagne (Histoire et généalogie mai 2007)