Jean Louis de CHANTELOUP Sr de la Brunetière

dimanche 16 mai 2021
par  Francis RENOUT
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(D’Avenières en Mayenne, à Fécamp dans le Pays de Caux)

Certains de nos ancêtres sont particulièrement difficile à localiser et à suivre car ils avaient obligation, de par leur fonction, le droit d’exercer leur emploi loin de leurs terres natales, ceci pour éviter toutes corruptions avec la population. Il en était de même au point de vue du mariage de ces personnes. Impossible de se marier avec une jeune fille de leur village. Il faut donc parfois s’armer de patience ; mais n’est ce pas là la qualité première d’un généalogiste !

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L’histoire de la famille Chantelou a pour origine la Sarthe. Leurs premiers ancêtres sont natifs d’Avoise, par René, qui est notaire subalterne et nommé sieur de la Durandière. Avoise, bourg de 200 feux, devient le fief des Barins de la Gallissonière entre 1701 et 1789. Son fils Pierre, né en 1680, quitte sa région natale pour s’installer à Saint Vénérand puis à Avénières, en Mayenne, villages situé à douze lieues. On peut supposer que son métier d’huissier royal y fut pour quelque chose. L’huissier royal (ou sergent royal) ne désignait pas un personnage de la cour mais le titulaire d’une charge d’huissier comme il en existait sur l’ensemble du royaume pour exécuter les décisions de justice. On précise qu’il est "royal" pour le distinguer de l’huissier seigneurial qui exécute les décisions relevant simplement d’une juridiction seigneuriale. Titulaire d’une charge qu’il a acheté, celui-ci doit faire preuve d’une bonne moralité. De nombreux enfants vont naître de ses deux unions. La famille Chanteloup fait partie des notables et des bourgeois locaux.

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(vue d’Avénières en mayenne)

Avénières ou Avesnières, ancienne commune de la Mayenne, située au sud du centre ville de Laval, composée de plusieurs hameaux, s’étendait entre les deux rives de la Mayenne. L’histoire de l’ancien village d’Avénières située sur la rive droite, point de passage entre les deux rives, est liée à celle de son église du XII ème siècle devenue la basilique Notre Dame en 1898. C’est autour de ce monument, que se concentrent les maisons les plus anciennes habitées autrefois par des tisserands. Les caves servaient au rouissage du lin. Avénières est devenu un quartier de Laval.

François Jean est le 5 ème enfant du second mariage de Pierre, né le 31 décembre 1715, à Saint Vénérand. Il se marie en ce village, le 7 janvier 1743, avec Louise Delaporte De la Noé Rousse, fille de marchand négociant, dont il aura quinze enfants. Au cours de sa vie, il sera procureur marguiller, marchand de vin en gros et négociant entre 1744 et 1759. Le procureur marguiller ou procureur de fabrique n’était pas un métier. Il était chargé des intérêts matériels de la communauté religieuse du village. Tout laisse à supposer qu’il exerçait à l’église d’Avenières, lieu où ont été baptisés tous ses enfants. Entre 1744 et 1753, il est nommé sieur de la Brunetière.

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Jean Louis Chanteloup est le 9 ème enfant du couple. Il nait le 3 février 1753, à Avénières. On ne sait rien de ses trente premières années de sa vie. A un moment donné, il quitte sa région natale et toute sa famille pour venir s’installer dans le Pays de Caux vers l’année 1785. Il est alors employé dans les fermes du Roy à Fécamp et habite à la paroisse Saint Ouen. Auparavant, il du exercer dans d’autres lieux mais autant chercher une aiguille dans une botte de foin !

C’est dans cette ville qu’il fit connaissance de sa future épouse nommée Thérèse Justine Mulot, de 13 ans plus jeune que lui, fille d’un maçon. Ceux-ci se marient le 1 août 1786, à l’église de la paroisse Saint Etienne, en présence de la mère de l’épouse et de la famille de Thérèse Justine. Il n’y a aucun représentant de la famille de l’époux, ce qui peut se comprendre vu l’éloignement. Le consentement du père de l’époux fut passé devant les notaires royaux de la Mayenne, le 10 octobre 1785, soit neuf mois auparavant.

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C’est à partir de ce mariage que l’on voit la signature : « Jean Louis De Chanteloup ». Depuis quand et pourquoi a t-il été ajouté cette particule ? Sur l’acte de mariage, le prêtre mentionne simplement : « Chantelou de la Brunetière ». Depuis cette période, cette famille qui s’est sédentarisée dans le Pays de Caux, porte le nom de « De Chanteloup ».

Devenir employé des fermes du Roi peut donc être une promotion, tout comme pour une femme, d’épouser un douanier, c’est un salaire assuré pour lui et sa famille..

Employé des fermes du Roi :

Les Fermes du Roy étaient des compagnies de financiers qui prenaient en bail la levée de l’impôt. Ils versaient au roi une somme forfaitaire et percevaient ensuite pour leur compte l’impôt royal dans toute l’étendue du royaume.

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L’institution de la Ferme Générale fut créé par Louis XIV et mise en place par Colbert en 1681, avec regroupement de plusieurs impôts royaux : aides, gabelles, domaines, traites et entrées. En 1774, la gabelle représente le tiers des revenus de la Ferme générale ; en 1788, elle atteint 51 %. Par la suite, elle fut étendue aux poudres et aux tabacs. Le service central de la ferme a son siège à Paris, à l’hôtel des fermes, rue de grenelle saint honoré. La cartographie pour les cinq grosses fermes fait apparaître 26 directions générales comprenant 1011 bureaux. Ce règlement de 1681 accordait aux employés de la ferme un certain nombre de privilèges.

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(plomb des douanes des fermes du roi)

La ferme du tabac en particulier,comportait un dispositif de surveillance maritime afin de lutter contre la contrebande en Normandie, Bretagne, Aquitaine et en Méditerranée. Elle disposait ainsi de pataches, et de canots et même de cutters navires plus importants. En Normandie la ferme générale en 1787 avait 100 hommes d’équipage, un commandant en chef des pataches, 5 cutters « de force » couvrant les côtes entre Dieppe et Granville.

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( carte des fermiers généraux de Laval en 1727)

En 1774 le bail de La Ferme Générale assurait 152 millions de livres de recettes à l’État et comptait 87 représentants de la finance aussi dénommés "fermiers généraux". Puissants et fortunés, ils présentaient des cautions financières solides. Pour assurer la levée de l’impôt auprès des français ils étaient amener à recruter de nombreux employés, aussi dénommés collecteurs. Ces employés sont les prédécesseurs des agents des impôts de l’administration moderne. Pour postuler, il fallait être âgé de 20 ans, être de religion catholique et savoir lire et écrire.

Cette ordonnance va perdurer jusqu’à la loi du 27 mars 1791 qui supprime la ferme et les fermiers généraux.

http://jumieges.free.fr/douarniers.html

Les années passent, des enfants naissent. Mais arrive la période révolutionnaire et de grands changements ! Une grande effervescence règne alors dans la région. La gravité de la crise saute aux yeux à la lecture des cahiers de doléances rédigés au cours des assemblées paroissiales qui eurent lieu du 1 au 8 mars 1789. L’impôt était devenu très impopulaire. De nombreux soulèvements populaires, à connotation antifiscale, se produisent. Les insurgés prenaient pour cible les barrières de l’octroi, un symbole du pouvoir des fermiers généraux. A partir du 23 septembre 1789, les visites domiciliaires sont interdites ; le 1 décembre 1790 est aboli la gabelle suivi le 27 mars 1791 de la ferme générale. Les brigades des douanes nationales remplacent alors celles des fermes du Roi.

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C’est donc un changement de statut pour Jean Louis qui devient préposé à la police du commerce extérieur des douanes de 1793 à 1800. Ce nouveau statut est créé par la régie des douanes françaises et son organisation est confiée à d’anciens fonctionnaires de la ferme générale. Ni les hommes, ni les méthodes ne sont vraiment nouveaux, mais la première administration d’état vient de naître. Les sièges des directions des douanes se situèrent dans les grandes villes frontalières et dans les ports maritimes. Par la suite, il est préposé aux douanes entre 1802 et 1810.

Au cours des années révolutionnaires, ses parents décèdent à deux ans d’intervalle, en 1794 et 1796, à Laval, en mayenne. C’est un neveu Jean Leclerc Guicheron qui est témoin aux deux décès.

La douane sous la révolution :

https://histoire-de-la-douane.org/la-douane-sous-la-revolution/

Entre 1787 et 1808 vont naître huit enfants : quatre garçons et quatre filles, dont deux décèdent en bas âge.

Vers 1818, alors âgé de 65 ans, Jean Louis est mentionné sur les actes comme « vivant de son bien ». On peut donc supposer qu’il n’a plus d’activité professionnelle ou qu’il est en retraite ? Une loi relative aux pensions de retraite à accorder aux employés de la régie des douanes est établie le 2 floréal de l’an V.

Il décède, le 28 juin 1833, à Fécamp, âgé de 80 ans. Son épouse le suivra quinze ans plus tard, le 21 septembre 1848, âgée de 81 ans.

Les douaniers retraités sous l’empire :

http://www.genehisto.com/framehisto.htm?/source/pages/H053.htm

Ernest Fort, peintre de l’uniforme des douanes :

https://histoire-de-la-douane.org/ernest-fort-peintre-de-luniforme-des-douanes-1ere-partie-1789-1852/

Jean Louis avait-il encore des liens avec sa famille en Mayenne depuis son mariage en 1786 ? Entretenait-il une correspondance avec ses parents, frères ou soeurs ? Rien ne permet de l’affirmer. Par contre, ses descendants s’établirent dans le Pays de Caux et ce, jusqu’à notre époque.

F.Renout
(Administrateur cgpcsm)
R

Sources :
Bruno Rivet (E comme écuyer des fermes du Roi)
Histoire de la douane française
Archives départementales de la Mayenne et de la Seine Maritime


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