Jean Benoît Désiré COCHET, prêtre, archéologue et conservateur

lundi 20 juillet 2020
par  Francis RENOUT
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Jean Benoît Désiré Cochet Cochet naquit le 7 mars 1812 à Sanvic, près du Havre, dans une maison aux tuiles moussues, descendant jusqu’à la grève. Cette maison dite des « trois cheminées » , située rue des tuileries, aujourd’hui au N° 3 et 5 de la rue Guillemard, dépendait de « la batterie des huguenots », dite aussi « batterie de la briqueterie ».

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Il est le fils de Jean Marie Cochet et de Victoire Pélagie Poidevin , mariés le 4 novembre 1811, au Havre. Le lendemain 8 mars, il est porté sur les fonds baptismaux d’une vieille église romane, assise au bord de la manche depuis le XI ème siècle, par des soldats de l’empire. Ceux-ci se nomment Charles Dumont, capitaine commandant des canonniers du Havre et Benoît Marcotte, sergent major des canonniers garde côtes. C’est le dernier prieur de l’abbaye de Valmont, Dom Monthois, qui lui verse l’eau du baptême sur le front.

Ses grand-parents paternels, Claude Cochet et Marguerite Simon se marient le 3 novembre 1761, à Saint Denis lès Bourg, dans l’Ain. Claude, habitant le hameau de la richonnière, est laboureur comme le fut aussi son père Pierre.

Son père militaire, originaire de l’ain où il est né le 12 mars 1773, à Saint Denis les bourg, qui a parcouru le monde à la suite de Napoléon, commande en cette année 1812, la batterie de la briqueterie, à Sanvic. C’est un brave artilleur qui a tiré le premier coup de canon au siège de Toulon et qui a été décoré pour sa belle conduite à ce siège. Sa mère, bonne chétienne, née le 5 juillet 1792 à la paroisse d’ingouville, au Havre, est la fille de Jean Jacques Poidevin, maître serrurier, marchand taillandier, et d’Anne Hélène Bacquet. Dix neuf ans séparent les deux époux.

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Deux ans après, en janvier1814, à la fin de la guerre napoléonienne en Russie, il est envoyé à Etretat comme gardien des trois batteries. C’est donc dans ce bourg que Jean Benoît Désiré grandit et fit ses études, ponctuées par la prière. Il écoute d’une oreille attentive son père raconter les phases de l’épopée napoléonienne et subit l’influence de ce rude soldat, à la moustache grise vieillie dans les camps. Il se façonne aux pieuses leçons de sa mère. A l’église, il prie avec ferveur et reçoit l’éducation par un moine bénédictin des abbayes du Bec et de Fécamp.

C’est donc à Etretat, où il passe son enfance, que surgit sa soif de connaissance. Il aime se promener sur la plage pour ramasser des coquillages et contempler ses hautes falaises blanches, où s’accrochent des plantes sauvages, qu’il cueille au passage. Il écoute les récits merveilleux des paysans qui avaient vu les dames blanches dansant sur les falaises ou les cavaliers galopant dans la plaine. Mais il sera bientôt arraché à son environnement.

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En effet, un prêtre l’abbé Robin, curé de Notre Dame du Havre, a remarqué la profonde piété et la brillante intelligence de Jean Benoît Désiré. En 1827, au vu des ses prédispositions intellectuelles, à quinze ans, il le confie au collège du Havre ; puis au petit séminaire du mont aux malades, près de Rouen, où il étonne ses maîtres par sa curiosité et son activité inépuisable, et ce, jusqu’en 1831.

Agé de dix huit ans, Désiré Cochet se prend de passion pour l’archéologie lorsque les restes d’une villa gallo-romaine sont découverts à Étretat. La recherche des antiquités n’en est qu’à ses débuts en Seine-Inférieure, la commission départementale des antiquités n’existe que depuis 1818, mais déjà Cochet est nommé correspondant de cette commission à la suite de rapports sur les fouilles d’Étretat. Il sera le pionnier et le fondateur de l’archéologie, plus particulièrement pour la période mérovingienne en France. Son œuvre porte essentiellement sur la haute normandie.

En 1834, un archéologue, Emmanuel Gaillard de Folleville, lui parle des sanctuaires mystérieux, des abbayes majestueuses, des couvents, des églises construites sur les côtes de Normandie. C’est pendant ses vacances que ses premiers coups de pioche donne le jour à un trésor, la crypte de saint Jean d’abbetot.

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En 1836, le 28 mai, il est ordonné prêtre, par Gustave Juste de Croy, archevêque de Rouen, son père nourricier. Celui-ci, né le 12 septembre 1773, est fils d’Anne Emmanuel de Croy, maréchal de camp, député aux états généraux en 1789, qui se démit le 22 novembre. Il émigra et rentra en France sous le consulat.

L’abbé Cochet fut vicaire à Saint-François du Havre du 28 mai 1836 au 24 octobre 1840, premier vicaire à Saint-Remi de Dieppe de 1840 à 1842, aumônier du Collège royal de Rouen du 1er avril 1842 au 1er février 1846, et enfin prêtre habitué à Saint-Jacques de Dieppe pendant vingt-neuf ans.

En 1842, il est reçu à l’académie de Rouen, puis nommé inspecteur des monuments historiques pour le département de la Seine-Inférieure en 1849. Il est enfin nommé conservateur du musée des antiquités de Rouen. C’est un archéologue de terrain qui insiste sur la nécessité de surveiller le travail des ouvriers pour ne manquer aucun détail, mais également d’examiner les objets en place dans leur contexte originel.

Atteint en 1845 d’une dépression nerveuse, il subit une grave crise qui l’amène à renoncer à un ministère sacerdotal vraiment actif. Celui-ci n’a plus le moral et tombe dans une faiblesse croissante. C’est monseigneur Blanquart de Bailleul, averti à temps, qui lui imposera un an de repos absolu. Le père de Gustave Flaubert, chirurgien à l’hôtel dieu, le força à s’installer à Dieppe, près de l’air salubre de la mer. Il se ressaisit le jour où on vient lui annoncer, qu’un ouvrier à découvert à Neuville lès Dieppe, au quartier du Pollet, une grande quantité de vases romains. Les fouilles qui suivirent furent fructueuses. Plus de 220 vases funéraires en terre et en verre virent le jour. Désormais, sa vie sera consacrée à l’archéologie et à l’étude des monuments historiques, ce qui ne l’empêchera pas de maintenir de bons rapports avec l’Église catholique.

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En 1846, il donne sa démission d’aumônier du collège de Rouen et se retire à Dieppe, dans une petite maison austère de la rue d’écosse où il y restera pendant 25 ans, jusqu’en 1871. Le rez de chaussée est occupé par sa mère et l’étage par lui-même. Son cabinet est encombré de livres et de brochures. Sur les tables se trouvent de nombreux objets antiques provenant de ses fouilles.

En 1847, il effectue les fouilles du cimetière mérovingien de Londinières.

En 1853, son père Jean Marie décède le 12 octobre, à Etretat, âgé de 80 ans. Il est mentionné chevalier de l’ordre impérial de la légion d’honneur. Le témoin est son fils qui signe son nom sur l’acte en mentionnant : « inspecteur des monuments historiques de seine inférieure ». Par la suite, son épouse, couturière, touchera une pension militaire pour veuve.

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L’abbé Cochet sera père nourricier de Paul Henri Cahingt, natif de Villers-sous-Foucarmont en 1825, fils de cultivateur venu à Londinières. Paul Henri commence des études au Collège de Dieppe. Dès l’âge de 15 ans, il s’intéresse à l’histoire, à l’archéologie et aux sciences naturelles. Revenu à Londinières près de sa mère, suite à la mort des son frère aîné, il dirige la ferme familiale, complète son instruction.

En 1846, il avise l’abbé Cochet, fondateur de l’archéologie du pays de Caux, des découvertes qu’il a faites dans les excavations du fossoyeur, tessons de poteries, squelettes, armes ; ce qui incite l’abbé à lancer un grand chantier de fouilles dans le cimetière de Londinières.

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Paul Henri Cahingt assiste alors Cochet dans la plupart de ses fouilles ceci durant une trentaine d’années. Il va ainsi prendre une part croissante dans ces fouilles (cimetière franc de Parfondeval, à Smermesnil, octobre-novembre 1851 ; vallée de l’Eaulne et Envermeu, 1852 ; cimetière franc de Lucy, automne 1853 ; cimetière gaulois de Bouelles, près de Neufchâtel, automne 1856 ; Bellengreville, 1863 ; camp de César, à Puys, 1864 ; cimetière franc de Douvrend, octobre 1865 ; cimetière franc à Criel, 1866 et 1874 ; Nesle-Normandeuse, 1867 ; Bois-l’Abbé, près d’Eu, 1868 ; villas romaines au triège de la Sallandrière, près du Lihu, à côté de Saint-Saëns, et au Camp-Souverain sur Les Ventes-Saint-Rémy, 1869 ; cimetière franc de Nesle-Hodeng, octobre 1869 ; Bailleul-Neuville, 1870 ; théâtre gallo-romain et villa à Saint-André-du-Cailly, juin-août 1870 ; cimetière franc d’Aubermesnil, octobre 1870 ; site gallo-romain du Bois-l’Abbé, automne 1872 ; Saint-Martin-Osmonville, automne 1873).

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En 1855, le 27 novembre, l’abbé Cochet est nommé chevalier de la légion d’honneur. Il est, avec Jacques Boucher de Perthes, l’un des fondateurs de l’archéologie comme discipline scientifique en France, et une référence pour la seine maritime et ses chercheurs en archéologie, malgré ses nombreuses erreurs d’interprétation. L’ensemble de ses publications se compose d’au moins 150 volumes ou brochures, et d’une multitude d’articles de journaux et de revues.

https://books.openedition.org/mnhn/2653?lang=fr

En 1856, il est parrain d’Henry Cahingt, fils de Paul Henri, qui sera professeur au collège Jehan Ango, situé à l’époque, quai Henri IV à Dieppe. Les actes du tabellionage local du XVIIème siècle, les registres de l’Amirauté qu’il découvrit, n’avaient pas de secrets pour lui. Il s’intéressa beaucoup aux graffiti marins, et particulièrement de navires découverts en l’église Saint-Jacques et ailleurs.

En 1862, il créé « la revue de Normandie » consacré à l’archéologie et aux beaux arts. Un abbé créant une revue est un événement qui provoqua quelques troubles dans le milieu religieux.

Son existence s’écoule à Dieppe jusqu’en 1867, date de sa nomination au poste de conservateur du musée départemental des Antiquités à Rouen.

En 1870, il perd la maîtrise de la parole et ne marche presque plus. A partir de 1871/1872, âgé de 60 ans, sa santé décline rapidement. Est ce la raison pour lequel il quitte Dieppe pour Rouen ? Il habite alors dans un immeuble, au N° 29 rue Saint Patrice, à Rouen, où il vit avec sa mère et sa secrétaire Marie thérèse Lecoeur.

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Il tombe partiellement paralysé en avril 1875. Des symptômes de plus en plus graves se manifestèrent. Très malade, il se fait porter le samedi 30 mai au musée de Rouen. Jean Benoît Désiré Cochet, plus connu sous le nom de l’abbé Cochet, atteint d’érysipèle, décède le mardi 1 juin 1875 à Rouen, à 16h en son domicile sis 29 rue Saint-Patrice, âgé de 63 ans.

Les obsèques ont lieu en l’église Saint Patrice, sa paroisse. Il est inhumé le 4, au cimetière monumental de Rouen. Un hommage lui fut rendu par Jean François Brianchon, son ami. Celui-ci, né en 1815, à Nesle Hodeng, fils d’un herbager, est un littérateur archéologue, disciple favori de l’abbé Cochet et membre de la Commission des Antiquités de Seine-Inférieure (1865).

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Le monument, élevé par souscription, a été inauguré le 4 juin 1877. Un buste en bronze, exécté par le statuaire Iselin, a été inaugué le 22 août 1877 et est exposé au musée des antiquités de Rouen.

https://www.rouen-histoire.com/Cimetieres/Monumental.htm

https://latourrobinson.pagesperso-orange.fr/indexcochet.html

https://www.rouen-histoire.com/Academie/Acad_Fich.php?id=477

F,Renout
(Administrateur cgpcsm)

Sources :
Raoul Duval (journal « la croix » 1912)
Alexandre Bouteiller (histoire de la ville de Dieppe des origines à nos jours)


Documents joints

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