Le scieur de long

jeudi 29 octobre 2015
par  Francis RENOUT
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Métiers d’autrefois : le Scieur de long..........

Scieurs sédentaires, scieurs itinérants

Au temps où les planches se nomment des ais, les scieurs de long sont des soyeurs d’ais. La technique est déjà pratiquée sous l’Antiquité romaine. Elle traverse les siècles jusqu’au début du XXème siècle. Les scieurs de long ont des origines et des modes de vie diverses.

  • Les sédentaires travaillent à proximité de leur domicile, pour la journée, parfois pour la semaine. Les hommes exercent ce métier de génération en génération et la main-d’œuvre locale est suffisante.
  • Les itinérants, souvent parents, vont dans un rayon de plusieurs dizaines de kilomètres autour de leur village, à l’intérieur de l’arrondissement. Sur leur passage, on les reconnaît avec leur besace sur l’épaule et leur outillage. Ils travaillent à façon chez les particuliers, les petits artisans et les fermiers : une pile de rondins, bien entassés dans un coin de la cour les attend. Hommes connus et reconnus, on leur offre le gîte et le couvert. Une fois leur travail achevé, ils s’en vont frapper à une autre porte, toujours à pied. Généralement, ils sont scieurs à la mauvaise saison et paysans lors des beaux jours.
  • Les ambulants parcourent inlassablement les campagnes à la recherche d’une opportunité. Sans attache familiale ni résidence fixe, ils espèrent être nourris, hébergés ou mieux recevoir quelques pièces.
  • Les immigrants, chassés de leur pays pour des raisons économiques ou politiques, et les migrants ou émigrants, essentiellement du Massif central, s’ajoutent aux gens du pays, vidant des communes entières.
    Tous ces hommes vont à la scie par nécessité et non par goût du voyage. Le climat, avec des hivers neigeux et sans fin, contraint ces paysans montagnards à une trop longue période d’inactivité. À ces laboureurs se joignent de modestes commerçants et artisans.

Le quotidien sur un chantier : sur les dents

Avec ses sabots, sa modeste tenue (pantalon de velours, traditionnelle blouse bleu foncé, grand chapeau ou vaste béret), son baluchon avec quelques rechanges et bien sûr quelques outils (haches, limes, chaînes, passe-partout et grande scie démontée), le scieur prend la route à pied, parcourant des centaines de kilomètres, par étapes.
Les gars qui travaillent en ville se réunissent pour louer une chambre à moindre frais dans le quartier ouvrier. En milieu rural, s’ils ne sont pas logés par l’employeur, le plus souvent, ils se construisent des cabanes plus miséreuses les unes que les autres sur le lieu du futur chantier. Ces constructions de fortune doivent être étanches pour les prémunir des intempéries et des bêtes sauvages. Les poêles ne sont pas légion et souvent le chauffage provient du feu à l’âtre : après une journée de dur labeur, le scieur a besoin d’un peu de chaleur pour réchauffer ses membres engourdis et sécher ses vêtements. Parfois, le froid est tel que les scieurs doivent battre en retraite. Le mobilier est des plus sommaires. La nourriture est frugale mais nourrissante pour ces travailleurs de force. La célèbre soupe du scieur de long, dans laquelle la cuillère tient debout, est de rigueur

LES OUTILS

Après avoir été abattu, l’arbre est d’abord débité avec le passe-partout (scie à deux poignées avec une large lame), puis il est équarri avec une hache appelée bigeoir ou hache à peler. Le doleur intervient alors pour tracer les ligne de coupe avec une simple corde trempée dans un mélange de cendres et d’eau qui laissera une ligne noire sur le tronc. La coupe va pouvoir commencer. Il faut alors hisser le tronc sur la chèvre (aussi appelée mouton ou chantier) ; il s’agit d’une longue poutre solide qui repose à une de ses extrémités au sol et à l’autre sur 2 ou 3 pieux solidement fixés au sol. Le tronc y est maintenu par une cale et une chaine de telle façon qu’il dépasse de la moitié de sa longueur. La niargue (scie composée d’un cadre de 1m60 sur 1m, d’une lame tendu par un écrou et d’une poignée) est alors affutée, le chevrier monte sur le tronc tandis que le renard saisi la partie inférieure de la scie. Commence alors le va-et-vient de la scie, rythmé par la chanson du scieur de long ; le chevrier tire la scie vers le haut, le renard scie le tronc en redescendant. On procède ainsi pour toutes les lignes précédemment tracées, puis on fait la pause en trinquant, on retourne le tronc et la même opération recommence pour l’autre moitié. A 2 cm de la fin, la coupe est arrêtée ; les planches se sépareront d’elles-même lorsque le tronc sera jeté à terre, produisant du même coup la signature des scieurs de long.


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