Pêche aux harengs dans le Pays de Caux
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Le hareng, le « poisson roi », fut le poisson de la pêche hivernale sur les côtes du pays de Caux pendant plusieurs siècles, jusque dans les années 1970.
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S’il est aujourd’hui essentiellement pêché en automne, au moment des grandes fêtes qui lui sont dédiées, le hareng faisait vivre autrefois des milliers de personnes dans les ports haut-normands.
La Manche est un couloir migratoire pour certains poissons. D’octobre à janvier, le hareng migre de la mer du nord à l’Atlantique en passant au large des côtes normandes. Ensuite, c’est au tour du maquereau de parcourir la Manche, mais dans le chemin inverse, d’ouest en est. Les pêcheurs du Tréport, de Dieppe, de Fécamp, de Honfleur et de la vallée de la Seine n’allaient pas laisser échapper cette manne qui leur assurait une activité presque continue de l’automne jusqu’à juin.
La pêche au hareng est très liée à l’histoire des ports normands, à Dieppe, Fécamp, Le Tréport. Au 19ème siècle, plus de 200 bateaux pêchaient ce poisson qui faisait vivre des milliers de personnes dans la région. On le pêchait très au Nord l’été et devant les falaises normandes en hiver. Se rassemblant en grande quantité sur les frayeurs le long des côtes de la Seine Maritime pour se reproduire, le hareng forme alors des bancs gigantesques
Au Moyen Âge, le hareng est le seul poisson faisant l’objet de la grande pêche, c’est-à-dire monopolisant des flottilles sur plusieurs jours.
Le hareng a fait la richesse de Fécamp et de son abbaye qui percevait une taxe sur le poisson. Le port de Fécamp, quant à lui, a été jusque dans les années 1980 le premier port de pèche à la morue et au hareng de France.
A Dieppe, pêcheurs hollandais et dieppois se côtoyaient dans une bonne entente
Fécamp apparaît très tôt dans l’histoire maritime de l’ancien duché. Creusé dans les falaises crayeuses par les ruisseaux de la Valmont et de Ganzeville, son port offrait un abri sûr aux navigateurs.
Une charte de Guillaume-le-bâtard vint confirmer à l’abbaye de la Sainte Trinité de Fécamp la pleine propriété de tous les ports de mer situés sur son fief. L’institution de la vicomté de la mer était composé d’un cellerier ou économe du couvent qui avait les pouvoirs de recettes et de juridiction. Il était assisté de trois officiers, comptables des droits dus sur le trafic de la mer, sur la pesée des marchandises et sur la pêche.
Dans tous les autres ports dépendant de l’abbaye : Saint Valéry en caux, Veules les roses, Veulettes sur mer, Saint Pierre en port, Petites et grandes Dalles et Yport, il y avait des commis qui se réunissaient chaque année début octobre, au logis abbatial, pour présenter les livres de comptes.
A Étretat, les rentes se payaient en deniers et harengs saurs. En 1667, Geoffroy Auberg doit à la seigneurie de Vertot, pour 1 vergée de terre, 4 deniers à la Saint-Michel et 16 harengs saurs à la Chandeleur ; Denis Fontaine, pour 3 vergées, doit 9 deniers et 25 harengs et demi ; le Trésor d’Étretat, pour 3 vergées, doit 18 deniers et 48 harengs.
Les marchands de poissons salés viennent de toute la France s’approvisionner en Normandie, surtout à Fécamp. Dans la première moitié du XVII ème siècle, le port de Fécamp arme 25 bateaux pour la pêche aux harengs. Malheureusement, en 1665, il ne reste plus que cinq bateaux, car aux difficultés d’accès du port se sont ajoutés de nouvelles impositions qui découragent les armateurs et les marchands. Saint Valéry en Caux et Fécamp doivent s’acquitter d’un droit de « Massicault » ainsi qu’un droit de deux sous sur la vente du poisson en faveur du seigneur du lieu.
En 1788, Fécamp arme 54 bateaux pour la pêche aux harengs. Ceux-ci sont aux mains d’une vingtaine de maisons d’armement. On trouve l’armement Bérigny avec 11 bateaux, puis Rigoult et Dupuis avec 5 bateaux chacun et ensuite les armements Pastey, Follin et Jacques Angot. 34% des pêcheurs sont originaires de Saint Valéry en Caux contre 7,4 % de Fécamp. Les autres viennent de huit paroisses de la côte.
A Dieppe, la pêche aux harengs est plus importante avec 60 bateaux.
La pêche se pratique avec des bateaux de 30 à 50 tonneaux montés de 25 hommes d’équipage. Le hareng se pêche à l’aide de sennes ou filets dont la maille a 2 pouces ou deux pouces et demi au carré. On utilisait un filet en nappe dérivant : la tessure. Chaque navire embarquait entre 40 à 60 sennes liées entre-elles pour former la tessure. Les longues tessures de filet mouillées verticalement formaient comme des barrières dans lesquelles les poissons sont arrêtés par les ouies. A bord des bateaux de pêche aux harengs, l’équipage était assez nombreux pour remonter les filets de chanvre alourdis par l’eau et pour débloquer les poissons.
La pêche aux harengs se pratiquait avec une grande quantité de filets qui nécessitait des bateaux avec des cales importantes. D’autre part, le grand mât devait être rabattable sur les lieux de pêche pour permettre à l’embarcation de dériver au gré des courants et du vent.
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Une anecdote à ce sujet :
Le 16 septembre 1730 ,le procureur du Roi, signale que le nommé Pierre Robert, domicilié à Saint Pierre en Port, nommé garde juré, ne connaît rien aux filets et ne saurait faire de rapports sur les contreventions. Il réclame sa destitution et présente pour le remplacer Pierre Bouffay, tendeur de basse eau, de la paroisse de Senneville.
Les pêcheurs ne pouvaient pas vivre uniquement de la pêche au hareng, il leur fallait un complément d’activité comme la pêche au maquereau ou au poisson frais, ou bien faire du cabotage.
F,Renout
sources diverses