La création des bains de mer à Dieppe

dimanche 21 janvier 2018
par  Francis RENOUT
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La mode des bains de mer naît en Angleterre à la fin du XVIIe siècle à une époque où la baignade sur prescription médicale se développe comme une opération commerciale.

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En 1753, le docteur Charles Russel publie Les effets des bains de mer sur les glandes, conseillant de boire l’eau de mer et s’y baigner pour des raisons médicales mais aussi religieuses. Il raisonnait ainsi : Dieu est bon mais a créé le mal, les maladies, il a donc dû placer dans la nature le remède au mal. Le plus grand réservoir des forces naturelles étant la mer, celle-ci doit être le plus puissant des remèdes.
Convaincu par cette théorie, le prince de Galles se rend à Brighton en 1783 pour soutenir l’ouverture du premier établissement de bains dans l’histoire .Les médecins français reprennent l’idée et dès 1769, Maret publie son « mémoire sur la manière d’agir des bains de mer et leurs usages vivifiants » contre les rhumatismes notamment .

http://plume-dhistoire.fr/bains-de-mer-des-tetes-couronnees-therapie-reglementee/

Le premier baigneur officiellement connu en France fut le roi Henri III qui serait venu dès juin 1578 à Dieppe sur le conseil de ses médecins.

Vers 1740, la mer et ses rivages cessent de faire peur. La vogue des bains de mer à but thérapeutique atteint la France à la fin du XVIIIe siècle :

En 1778, le premier institut de thalassothérapie français s’ouvre à Dieppe avec Lepecq de la Cloture.

en 1785, Cléry de Bécourt fonde à Boulogne-sur-Mer le plus ancien établissement français de bains de mer chauds.

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Les bains de mer étaient prescrits pour soigner la rage,la folie,les maladies de peau, la stérilité féminine, les maladies des nerfs, les problèmes de motricité etc. Le « bain à la lame », c’est-à-dire l’immersion dans la mer, était une pratique à son origine assez éprouvante. Deux« guides-baigneurs » plongeaient brusquement chaque malade à la renverse dans les vagues, nu, à plusieurs reprises ; selon le corps médical,les contractions dues au froid et à la terreur ressentis participaient à la guérison. Ces « bains froids » pouvaient s’effectuer également à l’aide de cabines roulantes conduites dans la mer, inspirées des bathing machines anglaises.

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A Dieppe, avant de devenir une plage, un espace public dédié à la baignade, la détente et la promenade, la « banquée » ou « chaussée de la mer » est à l’origine un territoire militaire relevant du Génie, une zone de défense littorale longue d’un kilomètre et demi. Séparé de la ville par les fortifications urbaines, ce vaste terrain dispose d’ouvrages défensifs, tels que chemin-couvert, batteries de canons et de mortiers protégés par des épaulements en terre, tours à usage de magasins ou poudrières, corps de garde ou postes d’observations.

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C’est entre 1809 et 1812, que Mr. de Paris fonde le premier établissement de bains à Dieppe

.Celui-ci était de nature très modeste !Il ne dispose que d’une cabane en bois, quelques tentes et de vieilles baignoires,Jean Baptiste Philippe de Paris était alors maître poulieur à Dieppe, métier exercé par cette famille depuis quelques générations.Il prend soin d’y attacher un médecin de la ville : Jullien Marie.

Biographie :

Jean baptiste Philippe De paris est né le 9 octobre 1750 à Dieppe, paroisse Saint Jacques, Fils de Jean Robert et d’Anne Françoise Thérèse Gréboval (fille de Jean et Anne Verel), mariés le 8 janvier 1750 à Dieppe Saint Jacques.

Ses aieux paternels, Jean de Paris et Marie Magdeleine Grège, se marièrent aussi à Dieppe Saint Jacques le 21 novembre 1715,Cette dernière était veuve de Guillaume Levasseur décédé deux ans plus tôt le 2 novembre 1713 à Saint Domingue.

Quand à Jean Baptiste Philippe, celui se maria deux fois au cours de sa vie ; la première fois, le 11 novembre 1777 à Dieppe Saint Jacques avec Marie Louise Rose Tonneville (acte 66 vue 44), et la seconde fois le 17 janvier 1784 à Dieppe Saint Rémy avec Marie Rose Françoise Lefebvre (vue6).De cette dernière union naquit un fils Jean Alexis Michel le 17 juillet 1785 à Dieppe saint jacques qui sera aussi poulieur.

Jean Baptiste Philippe décédait le 18 février 1823 à Dieppe.Il avait auparavant vendu son modeste établissement à une société qui en fit un établissement luxeux.

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A la chute de l’Empire (1815), les corsaires disparaissent tandis qu’une liaison transmanche favorise l’afflux des Anglais. Quelques grandes dames viennent se baigner à Dieppe. Parmi ces pionnières, la reine Hortense de Beauharnais (1783-1837) est accompagnée de ses enfants, dont le futur Napoléon III qui conservera le souvenir de ses baignades à Dieppe.

Le véritable premier « établissement des bains » de France est installé sur la plage en 1822.Le maire fait donc construire un établissement de bains digne de ce nom .L’édifice se présentait sous la forme d’une galerie, longue d’environ 50 mètres, coupée en son milieu d’un arc de triomphe et flanquée à ses extrémités de deux pavillons carrés, l’un réservé aux dames, l’autre aux hommes.

Devant le bâtiment, des pontons de bois mènent directement à la mer, des tentes décorées servent de vestiaires. Il était plus luxueux que celui de Mr Deparis et digne des dames de la cour qui font le voyage Paris-Dieppe en 15 heures (en chaise de poste).

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Mais la vogue des bains de mer est véritablement lancée par Marie-Caroline, duchesse de Berry, qui multiplie les séjours à Dieppe de 1824 à 1829. En août 1824, accueillie par une salve de de 21 coups de canon tirés du château, elle prend goût aux bains de mer et "lance" la plage de Dieppe. On construit pour elle une salle de bal, un théâtre qui même restauré à la fin du siècle dernier, reste encore baigné dans l’atmosphère de l’époque.

http://www4.culture.fr/patrimoines/patrimoine_monumental_et_archeologique/insitu/pdf/manase-702.pdf

Les femmes, en maillots six pièces, se changent à cette époque dans des cabines installées sur des charrettes tirées par des chevaux. Les baigneurs achètent auprès de l’établissement leur ticket de bain qui ouvre droit à la fourniture du costume et des serviettes, et à la location de l’indispensable voiture-baignoire. Aménagé en cabinet de toilette, celle-ci protège de l’air et des regards indiscrets ; tractée par un cheval, elle conduit le baigneur qui s’y est mis en tenue jusqu’à la mer et l’attend jusqu’à la fin de son bain

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Ces charrettes les amènent directement dans l’eau jusqu’à deux mètres de profondeur où elles descendent par des escaliers, soutenues par des « guides-jurés » (sortes de maître-nageurs en maillot une pièce assermentés pour ne pas attenter à leur pudeur) et surveillées par des censeurs. Ces guides plongent à plusieurs reprises les femmes de manière subite et de courte durée, c’est ce qu’on appelle le « bain à la lame »

Histoire du maillot de bain :

http://un-certain-regard.eklablog.com/histoire-du-maillot-de-bain-c18037180

D’autres établissements voient le jour sur la côte:Le Tréport (1830), Fécamp Le Havre, Granville et Saint Malo. La plage de Cayeux accueille ses premiers baigneurs dès 1840. La même année, Pierre Fanthomme construit au Crotoy un modeste établissement de bains en bois adossé aux anciennes fortifications. La construction des lignes de chemin de fer amplifie ce mouvement sous le Second Empire

F,Renout
Sources diverses dont archives départementales


Documents joints

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